Dans les bistrots, les hommes à bout de souffle
Brûlent leur vie en quelques cigarettes.
Dans ce monde où les sentiments s'essoufflent,
La liberté vit dans une oubliette.
Dans les bastringues, les humains se déglinguent
Buvant un vin qui n'a plus aucun goût,
A chaque verre, c'est un cœur qui se flingue
C'est un passé qui pisse de dégoût.
Dans les troquets, on maquille sa détresse
En bouteille d'alcool pour oublier,
Que lorsque les sentiments les délaissent.
La solitude baise avec les paumés.
Aussi vrai que quand on est seul,
On reste au bar à toujours espérer,
Un regard profond qui console,
Un pauvre chien qui veut bien vous aimer.
Et dans les bars l'humanité s'effeuille,
Un jour peut-être, elle refleurira.
Dans la fumée, la rancœur se dégueule
C'est elle qui crève nos cœurs au combat.
Vieux refoulés lorgnant encore les fesses,
De quelques vieilles qui s'en vont faire pipi
Ils étaient prisonniers dans leur jeunesse,
Mais ils le sont encore plus aujourd'hui.
Les bistrots sont le corbillard du peuple,
On y joue ce que l'on perd au tiercé.
Dans les villes nos sentiments se dépeuplent,
La chair se vend toujours à bon marché.
Et les vieillards se parlent sans comprendre,
De ce monde qui a beaucoup changé.
Il ne leur reste plus rien à défendre,
Leur idéal est mort et enterré.
Oh mon amour, raconte moi l'histoire
De cet enfant qui voulait tout aimer,
La terre entière est un grand abattoir,
Et les victimes sont de tous les côtés.
Raconte moi, ce qui fait que l'on s'aime,
Dans ce grand monde où tout est violenté.
Moi, j'aurais voulu t'écrire un poème,
Qui n'en finit jamais de commencer.
Et dans la nuit je cherche ton visage,
Je t'appelle mais tu ne réponds pas.
Dormir ensemble est un très long voyage,
Qu'on fait à deux, solitaire chaque fois.
Mourir d'amour est-ce encore possible ?
Oh mon amour, mon amour réponds moi,
Est-il possible de toucher l'impossible ?
Notre enfant, je sais il le touchera.
Je cherche un mot pour comprendre mes frères,
Je cherche un mot que je ne trouve pas.
Peut-on s'aimer par delà les frontières.
Mettre une fin à tous nos combats.
J'ai vu des vieux crever sans espérance,
Une jeunesse se traîner à genoux.
Vivre d'amour est notre seule chance,
Vivre d'amour et sortir de chez nous.
Dans les bistrots les hommes à bout de souffle,
Brûlent leur vie en quelques cigarettes.
Chaque fois que mes sentiments s'essoufflent,
Je vais mourir là où les gens font la fête.
Notre vieux monde sonne le glas,
Et je pense à notre enfant qui s'endort.
Son corps fragile entre tes bras,
Amour, ce qui est important c'est de l'aimer
Toujours plus fort,
Plus fort !
Elle peint comme un gosse qui court sur la place
Auprès des pigeons voyageurs
Elle peint comme un vieux clown qui se grimace
Pour qu'les enfants rient à plein cœur
Elle peint avec ses peurs et ses audaces,
Ses amours rires, ses amours pleurs.
Elle peint comme deux amoureux qui s'enlacent
Elle peint pour annoncer la couleur.
Elle peint la neige triste qui se meurt
Quand le printemps s'est réveillé
Elle peint l'oiseau blotti contre le cœur
De cet inconnu prisonnier
Elle peint un ciel qui se tord de douleur
Parc'que l'orage va éclater
Elle peint, elle peint toujours avec son cœur
Elle peint pour annoncer la couleur.
Elle peint avec des rêves qui se gouachent
Tissant les toiles au firmament
Elle peint son bel amour qui se détache
Les sanglots qu'elle garde dedans
Elle peint la liberté quand elle se fâche
Qu'elle crie des mots sans avoir peur.
Elle peint ses grands yeux noirs dont elle s'attache
Elle peint pour annoncer la couleur.
Elle peint, elle peint
Elle peint l'océan quand il ballade
Les mouettes au ciel de nos regards
Elle peint le balladin et ses ballades
Les rythmes fous de la guitare
Elle peint, elle peint le vent qui sans frontière
Souffle la vie et souffle encore
Elle peint pour que son geste soit lumière
Elle peint pour annoncer la couleur.
Elle peint la solitude qui l'enlace
Quand le pinceau guide sa main
Elle peint, elle peint, elle peint le temps
Qui toujours passe,
Elle peint les rides du chemin
Elle peint, elle peint et se sent si petite
La toile blanche, son coeur est fou
Elle peint et quitte à peindre toute sa vie
Même si le monde entier s'en fout.
Elle peint, elle peint
Elle peint et ne fait plus rien d'autre
Elle pense aux autres malgré tout
Elle peint les émotions qui sont les nôtres
Elle peint la vie qui est en nous.
Elle peint toutes nos envies quand elles se cachent
Les regrets de celui qui meurt
Elle peint, elle peint Chaplin et sa démarche
Quand il nous annonçait la couleur.
Elle peint comme un gosse qui court sur la place
Après des pigeons voyageurs
Elle peint comme un vieux clown qui se grimace
Pour qu'les enfants rient à plein cœur
Elle peint avec ses peurs et ses audaces,
Ses amours rires, ses amours pleurs.
Elle peint comme deux amoureux qui s'enlacent
Elle peint pour annoncer la couleur.
C'est vrai dans ma vie j'ai eu froid
Surtout ne sois pas triste
J'ai jamais eu froid comme pour toi
Même dans mes nuits d'artiste,
Ça fait trois heures que je t'attends,
Dehors il fait moins dix,
Moi qui ai bientôt quarante ans,
On dirait qu'j'en ai dix.
Est-ce à cause de tes yeux noisette
Que j'penche comme la tour de Pise ?
Moi qui n'en faisais qu'à ma tête,
Voilà que j'me civilise.
C'est vrai dans ma vie j'ai souffert,
Oh, surtout ne rigole pas
Moi qui marchais la tête en l'air,
Ben, voilà qu'j'marche la tête en bas !
J'te veux, quelle connerie mais j't'attends,
Ah ça je peux t'le dire !
Je vendrais mon âme à Satan
S'il te faisait venir.
J'vendrais ma p'tite sœur, mes copains,
Je vendrais tous mes bouquins, c'est vrai
Je vendrais même mon chien
Si seul'ment c'était le mien.
Je m'parle seul à seul, je bougonne,
A haute voix j'm'exprime
J'ai le cœur comme un petit gone
Comme un prolo sans sa prime,
Le cœur lourd comme un étranger
Quand il quitte son pays.
Et moi qui voudrais te quitter,
J'y arrive pas, tiens, c'est minuit !
La cathédrale, les cloches sonnent,
Cette journée est ajournée
Encore un jour que j'abandonne
Sans avoir pu te caresser,
Encore un jour passé sans toi,
Oh ça, ça n'peux plus durer !
Plus je marche, plus il fait froid
Et tous les cafés sont fermés.
Je marche vers ton domicile,
Je marche comme tous mes copains
Je marche et traverse la ville,
Les ombres me croisent, ne me disent rien,
Je marche tout en sachant déjà
Que jamais je ne sonnerai
Si ton mari dort dans tes bras,
Monter chez toi, jamais j'oserai !
C'est vrai dans ma vie j'ai eu froid
Surtout ne sois pas triste
J'ai jamais eu froid comme pour toi
Même dans mes nuits d'artiste,
Ça fait trois heures que je t'attends,
Dehors il fait moins dix
Moi qui ai bientôt quarante ans,
On dirait qu'j'en ai dix.
Ça fait grincer des dents
(Chanson de Bernard Haillant)
Ça fait grincer des dents de voir sur le trottoir
Une fille qui attend, et attend tous les soirs
Que les hommes s'amènent sans même gentillesse
Et la payent pour sa peine refusant la tendresse
Ça fait grincer des dents de voir ces têtes pâles
Parler plus que décent pour cacher leur moral
Et de voir que les mâles n'en prennent pas ombrage
N'apportent que leur rage aux fleurs fanées du mal
Ça fait grincer des dents de voir sur le trottoir
Un moufflet de six ans qui pleure sans un mouchoir
Parce qu'il a perdu une pièce de vingt sous
Pour lui c'était bien plus qu'un bonbon, qu'un joujou
Ça fait grincer des dents de voir ce que ce pâle
Mâchuré émouvant, qu'on bouscule, qu'on dit sale
Et de voir qu'on lui crie qu'il bouche le passage
Et de voir qu'on en rit disant qu'il n'est pas sage
Ça fait grincer des dents de voir sur le trottoir
Un clochard qui attend et qui se laisse choir
Mal rasé mal fringué, qui tend la main en vain
Avec l'air hébété que peut donner le vin
Ça fait grincer des dents de savoir que cet homme
Etait il y a vingt ans un amoureux, un homme
Mais il a tant souffert qu'on lui tue femme et gosses
Qu'il trouva la misère en attendant la fosse
Ça fait pleurer d'amour de voir la fille des rues
Embrasser le moufflet, retrouver ses vingt sous
Lui dire des mots gentils, repeigner ses cheveux
Et avec son mouchoir essuyer ses grands yeux
Ça fait pleurer d'amour de voir le gosse ému
S'en aller et siffler, et donner ses vingt sous
Au clochard qui sourit des larmes dans les yeux
Se dire un au revoir et se quitter heureux
Cette nostalgie quand tu t'en vas
Ce vide vide qui m'envahit
La solitude qui trahit
Tout le fragile combat
Cette révolte en mon amie
Qui m'accompagne à chaque pas
Cette révolte en moi pousse un cri
Qui jamais ne se calmera.
Je suis en toi, je n' pense à rien
C'est doux chez toi, je me sens bien
Je suis l'étranger dans la ville
Etrange vie que cette vie-là
Celle qui dérange les bien tranquilles
Au cimetière de l'au-delà
Je veux ma tombe à coté d'ceux
Qui ont osé mourir pour eux
Enterrez -moi sans larmes aux yeux
Jetez ma vie dans un grand feu.
Je suis en toi, je n' pense à rien
C'est doux chez toi, je me sens bien
Sans argent te reste le cœur
La pensée fouille à l'intérieur
Je n'suis pas qu'un accord mineur
Une note noire sans sa p'tite sœur
J'suis un piano désaccordé
A chaque accord j'me sens blousé
Oh ma p'tite sœur des épluchures
Je veux t'aimer grandeur nature.
Je suis en toi, je n' pense à rien
C'est doux chez toi, je me sens bien
Jamais ils ne pourront comprendre
Ils sont déjà loin du bonheur
Tu sais j'ai le temps de t'attendre
Puisque j'ai arrêté les heures
Poses ta main là où il faut
Provoque en moi cet infini
Je veux t'aimer à fleur de peau
Te voyager comme un pays.
Je suis en toi, je n' pense à rien
C'est doux chez toi, je me sens bien
Fenêtre ouverte sur la rue
Ton corps me parle avec frissons
Tu me souris et je suis nu
Je me sens tout petit garçon
J'suis maladroit, mes mains te cherchent
Tes yeux devinent mes pensées
Que toutes les morales me recherchent
Je veux sans fin te pénétrer.
Je suis en toi je n' pense à rien,
C'est doux chez toi, je me sens bien
Les vieilles toutes ratatinées
Restent enfermées dans leur maison
Elles ne viennent plus jacasser
Comme autrefois sur le perron
De l'église de Notre-Dame
Sur les vieux bancs face aux rosaces
Et le tricot entre leurs doigts
Et le mensonge entre leurs voix
Car on a cassé la glace
L'église et les rosaces
Les vieux se cachant de leurs femmes
Ne viendront plus sous les platanes
Parler de pêche et de boules
Devant un bon verre de vin rouge
Serrer la main à l'ami Jules
Lui dire patron, bois avec nous
Non, les vieux de chez nous
Ne viendront plus rêver ensemble
Car l'ami Jules est mort
On arrache platanes et fleurs
Et les oiseaux plein de soleil
N'égayeront plus les enfants
De leurs chants bleu peignant le ciel
Des couleurs chaudes du printemps
Les avions quadrillent l'espace
Dans les cours basses d'HLM
Des millions de gamins s'entassent
Loin des campagnes et de l'air frais
Car on a emprisonné le ciel
Les oiseaux et les enfants
Les gens s'étiolent dans les villes
Ils ne vivent que pour l'argent
Et le temps passe et le temps file
Au rythme des faux sentiments
Et moi je reste dans leur monde
Car je ne peux faire autrement
Je sais qu'un jour une de ces bombes
Fera péter les continents
Mais n'vous en faites pas braves gens
On meure qu'une fois d'être inconscient
C'était un joyeux C.R.S.
Qui avait refusé d'charger.
Il n'aimait pas botter les fesses
Des étudiants, des ouvriers.
Pendant que ses copains chargeaient,
Il s'en était allé pêcher,
Dans la rivière du poisson frais,
Loin de la ville et des casse-pieds.
Le vent taquinait sa casquette,
Les oiseaux chantaient pour lui seul.
Il avait une âme de poète,
Sans prétention et sans orgueil.
Un C.R.S. au cœur d'artiste,
C'est à faire rire un poulailler.
Pourtant, parole de moustique,
Il était plus doux qu'un baiser.
Quand il attrapait un poisson,
Il le relâchait aussitôt
En lui disant "Sauve toi mignon
Retourne faire des ronds dans l'eau."
Plus gosse qu'un gosse, c'est pas banal
Quand il s'agit d'un C.R.S.
Pourtant parole de journal
Il était plus doux qu'la tendresse.
La ville se tordait de violence,
Les C.R.S. qu'aimaient charger
Matraquaient, bourrés d'inconscience,
Les étudiants les ouvriers.
Une véritable boucherie,
Coups de matraque et coups de pieds.
Pouvez me croire, parole d'ami,
Un vrai massacre à bon marché.
Loin d'la bêtise, le C.R.S.
Qui avait refusé d'charger,
Roucoulait de joie et d'ivresse,
Au bord de l'eau endimanché.
Il faisait des vers dans sa tête,
De quoi faire rire un arsenal,
C'est vrai parole de muette,
Il était plus joyeux qu'un bal.
Le soleil qui clignait de l'œil,
Lui indiquait l'heure de rentrer,
Il bourra ses poches de feuilles,
Son revolver et ses souliers.
Il voulait ressembler aux arbres,
C'est à chausser un va-nu-pieds,
Pourtant, parole de gendarme,
Il finit par leur ressembler.
Mais sur le chemin du retour,
Il croisa des manifestants,
Qui s'en revenaient du faubourg
Où l'on faisait couler le sang.
A le voir seul, ils l'empoignèrent,
Le massacrèrent avec plaisir.
Pourtant, parole de mystère,
Il était doux à en mourir.
Ils le laissèrent dans les feuillages
Sa tête baignant dans son sang.
Il referma ses yeux sans rage,
Conscient de mourir non violent.
Un C.R.S. qui meurt conscient,
C'est à faire rire un monde entier.
Pourtant parole de croquant,
Il est mort sans arrière-pensée.
La morale de cette histoire,
Elle n'a pas de moralité.
Ce n'est pas une chanson à boire,
Même pas une chanson à chanter.
Si tu as l'esprit de justice,
Si faire le bien est ton désir,
Ne t'engage pas dans la police,
"T'es pas payé pour réfléchir."
C'était un joyeux C.R.S.
Qui avait refusé d'charger,
Il n'aimait pas botter les fesses,
Des étudiants, des ouvriers.
Pendant que ses copains chargeaient,
Il s'en était allé pêcher,
Dans la rivière du poisson frais.
Loin de la ville et des casse-pieds.
Entre les juges et les notables,
Les privilèges et les paumés,
Le non-confort, le confortable,
Les injustices, les justiciers.
Entre les querelles et les guerres,
Les oppresseurs, les opprimés,
Les civils et les militaires,
S'étend la vie au monde entier.
R . Mais y'a quand même des enfants qui s'aime
Et qui s'aiment tendrement.
Y'a quand même pendues au ciel
Des étoiles depuis cent mille ans.
Pour ne rien dire, pour ne rien faire,
Pour laisser passer les années,
Civilisés et gens de terre,
Villes désertes, champs goudronnés,
Sur les trottoirs, en grande foule,
Se bousculent, s'écrasent les gens,
Elle sera surpeuplée la boule
Dans cinquante ans disent les savants.
R.
Entre les Ricains et les Russes,
Entre le reste et les chinois,
Entre les traités et les rustres
Qui font des guerres pour n'importe quoi,
Avec des yeux remplis de larmes
Comme des yeux d'enfants apeurés.
Et le pape de paix nous parle
Sur son trône de misère dorée.
Entre les peuples, les présidents,
Les élections, les révolutions,
Les salopards, les braves gens,
Le ciné, la télévision.
Les artistes et les réceptions,
Les yaourts et l'avortement,
La drogue et les petits bonbons,
Les naissances et les enterrements.
R.
Je sais qu'il y a de l'injustice,
Je sais que tout n'est pas pareil.
C'est ce que dit la politique,
C'est ce que voit Madame Soleil.
Faut-il que je prenne les armes,
Faut-il que je ne dise rien ?
Je ne peux pas sonner l'alarme,
Tous les gens n'y comprendraient rien.
Entre les juges, les diplomates,
Les philosophes et les banquiers,
Les vacanciers, les automates,
Les grosses villas, les bas quartiers.
Entre les jaunes et les rouges,
Entre les noirs et puis les blancs,
Elle va s'casser la gueule, la boule
Dans cinquante ans disent les savants.
R.
Pardonne moi Seigneur
Je ne sais pas prier
Pour moi avoir du cœur
Ce n'est pas s'agenouiller
Pardonne moi Marie
De te trouver plus belle
Couchée au creux d'un lit
Que de mourir pucelle
Pardonne moi l'Esprit
De ne pas être un saint
Mais dans ton paradis
Je ne me sens pas bien
Pardonne moi mon père
La vie t'a mutilé
Il faut la payer cher
Je ne peux la payer
Pardonne moi ma mère
Un jour d'être parti
Tu étais ma chaumière
Et j'étais ton pays
J'avais besoin ma mère
D'être l'ami du vent
Et tout comme naguère
Moi je t'aime, Maman
Pardonne moi mon frère
De quitter la maison
Pour parcourir la terre
Sans but ni religion
Pardonne moi famille
Mon cœur est en frisson
Dehors le soleil brille
Je fuis votre prison
Pardonne moi ma sœur
D'aimer plus que l'inceste
Pour faire battre deux cœurs
Il faut d'énormes gestes
Pardonnez moi copains
De vous avoir laisser
D'être parti plus loin
Que notre vieux quartier
Pardonne moi ma ville
De déserter tes rues
Dans ton enclos débile
Moi je n'en pouvais plus
Pardonne moi passé
Entend ces souvenirs
De ne plus y penser
De vous laisser mourir
Pardonne moi fillette
De te prendre la main
Je veux poser ma tête
Au creux de tes deux seins
Pardonne moi amour
De trembler dans tes bras
Vouloir s'aimer toujours
Est le plus dur combat
Pardonne moi mon ange
De ne pas me marier
Tu es une mésange
Et tu dois t'envoler
Pardonne moi petit
De ne rien te défendre
Le secret de la vie
C'est à toi de l'apprendre
Pardonne moi fiston
D'oser t'avoir fait naître
La terre est une maison
Ouvre grand ses fenêtres
Pardonne moi mouflet
Je n'suis pas un bon père
Confie moi tes secrets
C'est tout ce que j'espère (bis).
A ce cri premier qui naissance nos vies
Puissant comme la foudre, il est le premier cri.
Il ne sait pas encore s'il sera symphonie,
Ce tout petit accord cherche sa mélodie.
Il est force et courage notre tout premier cri.
Il n'a pas de visage, on ne l'a pas écrit.
Il est livre sans pages, histoire sans manuscrit,
Il n'est pas encore sage, il est le premier cri.
Il souffle comme le vent, il soleille et il pluie.
Algues sans océan, prisonnier qui s'enfuit.
Il forge notre voix, il crie à pleine vie.
Il est sans toit ni loi, il est le libre esprit.
Je m'en souviens par joie de mon tout premier cri,
Car je le porte en moi et il me porte aussi.
Il vibre mes passions, j'entends ce qu'il me dit.
Il est mon compagnon, il est mon premier cri.
Lorsque la mort viendra, elle le prendra aussi.
Et il s'endormira et moi tout contre lui,
Ensemble voyageant, vers d'autres galaxies,
Vers d'autres sentiments que l'on ignore ici.
A ce cri premier qui naissance nos vies,
Magicien de nos âmes, il est le premier cri.
On dit des gens sans importance
Des gens qui ne sont jamais nés,
Des anonymes, des pas de chance
Des gueules meurtries, des gueules cassées
Des pauvres gens en mal de chance
Qui doivent se taire et travailler
Des gens qui ont perdu d'avance
Pour ceux qui croient avoir gagné,
On dit des gens sans éloquence
Des gens sans grandeur à venir
On dit des gens sans importance
On dit des gens sans avenir.
J'en ai vu des gens sur ma route,
Des tragédies, des fantaisies,
Des gens qui malgré leur déroute
Faisaient encore valser la vie.
Des gens qui n'avaient rien du tout
Qui pourtant t'auraient tout donné,
Des gens tombés qui d'un seul coup
Essayaient de se relever.
J'en ai vu des gens sans histoire
Qui se racontaient sans tricher
Des gens muets dans leur parloir
Qui ne savaient plus à qui parler.
Oui j'ai vu des gens sans défense
Des cœurs meurtris abandonnés,
Qui du profond de leur souffrance
Croyaient encore au verbe aimer.
Des gens de tout bord de tout large
Des gens d'horizon si lointain, des gens
Qui comptaient page à page
Les maladresses de leur destin.
Des gens qui n'usaient d'aucun charme
Des gens de soucis quotidiens
Des gens démunis et sans arme,
Que l'on fusille tous les matins
On dit des gens sans importance
Des gens qui ne sont pas cités
Des gens qui comptent leur dimanche
Et qui ne savent pas bien compter
On dit des gens sans un diplôme
Des gens sans université
Qui n'ont pas inventé l'atome
Et qu'on envoie se faire tuer
On dit des gens sans aventure
Frileux dans leur sécurité
Des gens qui se tuent en voiture
Parce qu'ils voulaient accélérer
J'en ai vu des gens, des ivrognes,
Des comptoirs toute la journée
Des qui s'étaient cognés la trogne
A leur amour à leur passé
J'en ai vu des gens sans bonheur
Qui s'en allaient petitement
Des gens qui réclamaient encore
Le droit de vivre dignement
On les regarde dans leur mouroir
Ils nous font rire bien souvent
Des gens sans nom, des gens sans gloire,
Des gens tout court, des petites gens
J'ai vu des gens couverts de gloire
Des stars repues et adulées
Qui pleuraient devant leur miroir
Parce que des rides avaient poussé
Comme pour crevasser leur visage
Comme si la mort les torturait
Arrivées au bout du voyage
Ne sachant plus qui elles étaient
J'ai vu des gens couverts d'argent
Se cacher pour pouvoir pleurer
Et redevenir impuissants
Car leur enfant s'est suicidé,
Et plus rien n'avait d'importance !
J'ai vu des gens pleins d'importance
Se dire en bonne volonté
Tricher en toute impénitence
Pour le pouvoir assassiné
J'ai vu des assassins de l'ordre
Fusiller des hommes innocents
Au nom de l'État en désordre
Emprisonner les opposants.
J'ai vu ces rois, ces présidences,
Eux qui se croyaient les plus forts,
Recroquevillés dans leur puissance
Trembler de peur face à la mort.
On dit des gens sans importance
Qui n'ont jamais tué un chat
Des gens fleuris comme l'enfance
Qui pour mourir tendent les bras.
J'ai vu des gens tellement sensibles
Que pour parler ils se noyaient,
Des gens qu'on traitait d'imbéciles
Et qui simplement souriaient.
J'ai vu ces gens, ces invisibles,
Qui tout simplement cheminaient,
Avec des rêves inaccessibles
Mais que parfois ils atteignaient.
On dit des gens sans importance
J'ai vu ces gens avec mes yeux,
Ils sont ma joie et ma souffrance
J'ai besoin de te parler d'eux.
On dit des gens sans importance.
Deux vieux qui s'aiment encore
Après avoir souffert et s'être fatigués,
Dans la vie sans nom où rien ne fut gagné
Il y eut des chagrins, des instants de bonheur
Le reste n'était rien que l'envers du décor.
Les enfants sont partis, ils ne sont plus les mêmes,
Ils ne prennent plus le temps, le travail, les problèmes
Les vieux ne comptent plus ; c'est un jouet usé,
Un pauvre souvenir, ou une fleur fanée.
Deux vieux qui s'aiment encore.
Lui s'en va au travail, ça ne le change pas,
Elle reste à la maison, c'n'est plus comme autrefois,
Son ombre qui la suit lui parle du passé,
Mais qu'est-ce que le passé quand on n'est jamais né,
Une vie de marmots, de loyers et d'impôts
Enfin c'est comme cela, ils ont fait leur boulot,
Abandonnés de tous, presqu'au bout du rouleau,
Ils continuent la route une bosse dans le dos.
Deux vieux qui s'aiment encore.
Travaille, travaille, travaille, pour nourrir ta misère
Abrutis et perdus, tant on les a saignés,
Leur vie qu'ils ont vendue ne fut jamais payée.
Leurs deux corps démodés sont comme un hôpital
Quatre murs pour crever, parait que c'est normal,
Car s'il y a des gens riches qui font souvent la fête,
Il y a des gens qui meurent au fond d'une oubliette.
Deux vieux qui s'aiment encore.
N'y a-t-il pas pour eux quelque part un jardin,
Une petite maison, un morceau de terrain ?
Leurs yeux sont malheureux dans le gris H.L.M.
Le chenil pour finir, c'est ainsi qu'on les aime,
Sous les draps, bien au chaud, quand les lumières s'éteignent,
Il la prend contre lui, la serre et la dépeigne,
Deux pauvres mains ridées ruissellent de tendresse,
Le bonheur de s'aimer apaise leur détresse.
Deux vieux qui s'aiment encore.
La nuit s'est endormie, les étoiles respirent.
Ils se sont enlacés au rythme des soupirs,
Leurs cheveux blancs mêlés dans le lit du passé,
Leur vie est une galère, ils ont toujours ramé.
Deux vieux qui s'aiment encore.
Jean-Marc LE BIHAN Paroles - 1 -
|
||